Directeurs du programme : Luc Gabolde (CNRS, co-directeur du CFEETK), Ahmed Al-Taher (MoTA, co-directeur du CFEETK)
Responsable archéologie : Matthieu Vanpeene (architecte-archéologue, CNRS-CFEETK)
Collaboration institutionnelle : CFEETK (MoTA / CNRS), Ministère de l’Europe et des Affaires Etrangères (MEAE, France)
Collaborateurs : Sylvie Marchand (céramologue, IFAO-CFEETK), Florie Pirou (épigraphiste, CNRS-CFEETK), Raphaël Angevin (archéologue, UMR 7041 ARSCAN)
Localisation de la fouille : Secteur sud-est (ZSE) de l’enceinte de Karnak
Numéro opération CFEETK : OP189 (2019 – en cours)
Résumé du projet
Malgré plus d’un siècle de recherches sur le site de Karnak, demeure une énigme lancinante et non résolue : celle de son ancienneté ! Bien des théories ont été émises qui balançaient entre une antiquité reculée remontant à l’Ancien Empire (vers -2600), voire à la Préhistoire (vers -3000) et une ancienneté ne dépassant pas la XIe dynastie, voire la Première Période Intermédiaire (vers -2000). Mais ces théories, certes étayées et parfois convaincantes, demeurent des hypothèses. Il leur faut des confirmations probantes.
Un des secteurs les plus prometteurs pour trouver des vestiges de haute antiquité est situé dans l’angle sud-est de l’enceinte d’Amon-Rê, là où, entre 1900 et 1905 G. Legrain avait initié des recherches archéologiques. Sous des couches Moyen Empire, il semblait avoir découvert des niveaux prédynastiques : « Les sondages faits depuis cette époque ont amené la découverte de fragments de vases de poteries et de silex taillés d’époque archaïque, montrant que là se trouve une partie de la Thèbes des premières dynasties (janvier 1907). » (Legrain, 1906b, 113, n. 1).
En 1907-1908, L. Lortet effectuait à son tour des sondages étendus dans ce secteur, juste au nord de ceux de Legrain. C’est essentiellement du matériel du Moyen Empire qui semblait en avoir été extrait, même si des éléments plus anciens pourraient y avoir été mêlés.
Par la suite, L. Franchet avait effectué tout à côté, en 1912-1913, des fouilles à la recherches de céramiques susceptibles de livrer un tableau complet de la poterie égyptienne du prédynastique à l’époque romaine (Franchet, 1917, 83-99). Une analyse de la stratigraphie issue de ses sondages met en évidence la découverte, au plus profond de la fouille, de matériel prédynastique : un vase conique « black-topped » (caractéristique de la période Nagada I à IIB), une tête de hache polie (antérieure au Nagada III et aux dynasties I et II). Ce matériel est aujourd’hui perdu et seul un décapage de ses sondages permettrait de contrôler la datation de sa stratigraphie par le dégagement de nouveaux matériels et de vérifier leur cohérence avec les trouvailles prédynastiques de E. Chantre, G. Maspero et J. Lauffray à Karnak malheureusement totalement hors contexte.
Enfin, une quarantaine de mètre au nord-ouest du sondage de L. Franchet, M. Millet a effectué en 2001-2003 une fouille (fig. 9) dont seul le rapport préliminaire a été publié (Millet, 2007). Le sondage semble avoir atteint des niveaux de la Première Période Intermédiaire (vers 2100 Av EC) voire de la VIe dynastie (vers 2400 Av EC) mais sans que l’exploration puisse être poursuivie au-delà.
Le terrain est donc riche d’un potentiel avéré de trouvailles des hautes époques, voire archaïques. D’ores et déjà les explorations menée en 2022 (après des décapages initiaux menés en 2019) ont permis d’atteindre des niveaux — non perturbés — de la XIIe dynastie. Donc les espoirs de trouver au-dessous les vestiges des occupations primitives ne sont pas obérés par les fouilles et pillages modernes.
Objectifs
On l’a vu, les hypothèses demeurant des hypothèses, rien ne vaut une preuve archéologique tangible issue d’une fouille fine et dédiée : assurément la question de l’ancienneté des installations sur le site de Karnak ne pourra être résolue que par de nouvelles recherches archéologiques conduites en profondeur.
L’opération 189 (OP189), a donc été planifiée et, après un premier survey en 2019, les travaux purent reprendre en décembre 2021 et se sont poursuivis jusqu’au printemps 2022. La mise au jour dans ce secteur des strates du Moyen Empire scellant le contexte archéologique permet d’ailleurs d’augurer la présence de niveaux antérieures préservés in situ et non perturbés. La stratigraphie antérieure est donc, là, non bouleversée et seule la poursuite de l’exploration pourra nous dire jusqu’à quelle date primitive elle nous mènera.
Ces niveaux du Moyen Empire fournissent déjà en eux mêmes une intéressante plus value à la fouille avec le dégagement préliminaire des installations d’ateliers de boulangerie de la XIIe dynastie sur une surface significative. Ces structures très peu et mal documentées à Karnak même ajouteront un volet historique et sociologique novateur à notre connaissance du site. La fouille de ce secteur sera donc également progressivement étendue au cours des prochaines saisons.